Dans l’une de ses brèves destinées aux "manager.euse.s", une direction de la Région a fait la promotion de la "respiration carrée" via un lien menant vers un site naturopathe. La respiration carrée fait partie des pratiques de la méditation pleine conscience, et la méditation pleine conscience est une des composantes du développement personnel.
La promotion de ces pratiques dans la sphère professionnelle, notamment dans le secteur de la formation ou du coaching, fait l’objet de nombreuses saisines de la MIVILUDES pour dérives sectaires.
En tant que syndicat représentatif des personnels, SUD estime que ces outils individualisent les problèmes, et responsabilisent les victimes qui doivent chercher en elleux des réponses pour des difficultés dont ielles ne sont pas la cause.
Lesquels problèmes, pendant ce temps-là, ne sont pas résolus, ce qui est donc incompatible avec les exigences du Code du travail qui rappelle que "le travail s’adapte à l’homme" et non l’inverse, et que l’employeur est responsable de la préservation de la santé physique et mentale de ses salarié.e.s (avec obligation de résultat).
SUD demande de travailler dans le respect du cadre légal de la prévention des risques professionnels, avec des personnes qualifiées et non des charlatan.e.s.
SUD aborde le travail dans toutes ses composantes, santé physique et mentale, ergonomie, effectifs, outils, organisations... et base ses analyses sur des travaux sérieux (sociologues du travail, psychologues, ergonomes...).
Les formations et notamment les Hivernales proposées par cette direction de la collectivité régionale, s’inscrivent dans une tendance managériale plus large, qui vont dans l’autre sens et poussent les personnels à s’adapter à leur travail, ils doivent pour cela devenir des "héros", et maintenant être résilients.
On le voit très bien dans le programme proposé pour les Hivernales : l’idée finale est de pousser les participant.e.s à plus performer, sans se questionner sur leurs ressources mais en organisant mieux le travail.
C’est une logique d’optimisation des moyens à disposition par les personnes elles-mêmes, qui est peu ou prou celle du lean-management. Les astuces d’organisation ne visent au final qu’à pousser la performance, sans moyens supplémentaires, ni questionnement des moyens nécessaires pour atteindre les objectifs donnés (effectifs, formations, outils, locaux...). Alors que cela fait pleinement partie des responsabilités des encadrant.e.s, comme ielles sont responsable de la protection de la santé physique et mentale des personnels travaillant sous leur autorité.
Le développement personnel est dans ce contexte un outil pour inciter les personnes à prendre sur elles, à faire avec ce qu’on leur donne (beau "challenge" !), faisant fi de toutes les conditions externes qu’elles ne maîtrisent pas. C’est en soi un outil de domination et d’exploitation.
Le bonheur au travail ne peut relever de l’injonction. Les conflits au travail, le stress, ne se résolvent pas en respirant et reprenant son calme, ils ont des causes qui sont très souvent structurelles et indépendantes des personnes.
Pour autant, les méthodes développées par cette direction visent à ne surtout pas remettre en cause un système globalement violent et maltraitant (changements permanents, baisse des moyens, discours culpabilisants, dérives managériales non sanctionnées...), mais incitent à s’y adapter, à se dépasser, à prendre sur soi et pire, à s’identifier soi-même comme cause de son problème (acteur.trice de sa situation).
C’est en cela que ce n’est pas conforme au code du travail. C’est même dangereux.
Pendant ce temps-là, SUD reçoit des agent.e.s qui pleurent, qui sont persuadé.e.s qu’ielles sont elleux-mêmes la cause de leur souffrance, qu’ielles ne peuvent pas s’adapter, et qui sont démuni.e.s.
Via ses missions, la direction en question participe, consciemment ou non, à faire croire aux agent.e.s qu’ielles seraient mal organisé.e.s, en évitant bien d’aborder la question des moyens.
On a vu tout le cynisme de cette approche concernant le secteur hospitalier ces dernières années, à qui il a été reproché d’être mal organisé…
Pour mieux comprendre ces mécanismes, SUD conseille quelques excellentes lectures :
– Le code du travail
– Le développement personnel : nouvel opium du peuple ? de Damien KARBOVNIK
– Tout le monde a besoin d’un coach. la grande enquête sur les dangers du coaching, de Thibault SCHEPMAN
- Le management désincarné, Marie-Anne DUJARIER
et bien sûr la brochure éditée par la fédération SUDCT, qui pourrait être utile dans la politique achat régionale.
On ajoute pour la forme l’excellent livre de Yohann CHAPOUTOT, Libres d’obéir, le management du nazisme à aujourd’hui, qui rappelle les origines du management moderne (par objectifs, happy management...), à lire d’urgence.
Enfin, au vu du rapprochement actuel de l’extrême droite avec les patrons et le monde de l’entreprise, SUD continuera de dénoncer les dérives managériales, et ce qui porte atteinte à nos conditions de travail ainsi qu’aux conditions d’émancipation des travailleur.euse.s.
Le développement personnel pousse au repli sur soi et à l’acceptation de mauvaises conditions de travail, notre syndicalisme encourage l’ouverture, la défense collective et la solidarité entre collègues !


